Le projet Massargues

Massargues, vestige d’un bourg médiéval enfoui sous la garrigue

A quelques kilomètres au nord de Saint-Quentin-la-Poterie, un jeune archéologue découvre sous une végétation de garrigue​ très dense de vastes ruines de maisons médiévales des XIIe et XIIIe siècles. Le Service Régional de l’Archéologie (SRA-DRAC) accorde une campagne de « fouille probatoire » en 2018 afin d’estimer le potentiel de ce site jusqu’alors inédit, oublié de la mémoire collective. L’association L’Uzège s’associe pleinement à cette campagne et porte désormais à l’échelle locale les recherches à venir sur ce qui s’avère être l’un des sites archéologiques majeurs du pays médiéval d’Uzès. Parallèlement, une relecture du dossier historique (étude des textes anciens) a permis d’identifier ce site ainsi nommé Massargues (Marsanicis, autrement appelé Villa-Sicca ou Villesèche), qui n’était pas un village, mais un véritable bourg dont la création est en lien avec la cité médiévale d’Uzès en formation.

Un contexte historique exceptionnel

Vers la charnière des XIe-XIIe siècles, la « gouvernance raisonnée » de l’Evêque d’Uzès, qui associe étroitement les familles nobles de cette cité, contrôle un vaste territoire qui va du Gardon à la Cèze (ancien diocèse civique d’Uzès), pays relativement « enclavé », distant des principales voies de communication de l’époque (vallée du Rhône, voie littorale, voie Alès-Nîmes). C’est alors que dans le cadre d’un renouveau économique du pays d’Uzès, le comte de Toulouse fonde une Villeneuve – Massargues – aux abords de l’ancienne cité uzétienne, sur un probable axe économique majeur traversant d’est en ouest le vaste plateau du pays d’Uzès, afin de relier la vallée du Rhône au pays cévenol. Au XIIIe siècle, Massargues est nommé le « quarton de Raymond » (du nom de la maison Raymondine à Toulouse), soit l’un des quatre quartiers d’une ville alors multipolaire : Uzès.

Résultats des fouilles 2018–2024 : Massargues, l’ensemble urbain médiéval le plus ancien recensé dans le sud de la France !

La première campagne triennale de fouilles, achevée en 2024, a confirmé que Massargues est un site majeur.

Datant du IXᵉ–Xᵉ siècle, le site, d’une superficie totale de l’ordre de 3 hectares, a pour l’instant été fouillé sur une surface significative de 4200 M2. Il a été conçu selon un plan régulateur de type « villeneuve » dont témoigne un réseau de rues en lanières avec de grands complexes fonciers à bâtiments multiples organisés autour de cours privatives et accompagnés d’installations artisanales de pressage avec cuves en mortier. Les analyses de trois cuves ont confirmé la présence, dans le bourg, d’une production d’huile envisagée à grande échelle, à but économique, très originale pour cette période du Moyen Âge. Massargues pourrait aussi être un ancien centre de sociabilité, lieu de l’universitas, ces communautés d’hommes et de femmes libres que vont progressivement s’efforcer de contrôler ou d’étouffer les potentats locaux, après l’an Mil et l’essor des seigneuries banales.

Avant une possible reprise de la campagne archéologique globale dans quelques années, une fouille spécifique d’environ 200 m2 restant dans le périmètre déjà fouillé ainsi que des analyses de restes fauniques vont avoir lieu au printemps prochain.  Un rapport scientifique couvrant l’ensemble des travaux engagés depuis 2018 sera produit fin 2026.